Alain Durand
"Un sourire en plus"

Jane POUPELET était l’une des rares femmes à faire partie du cercle des sculpteurs Maillol, Giacometti et Bourdelle, au début du XXème siècle. Elle se distinguait par sa virtuosité quand il s'agissait de traiter le corps féminin ou animal tout
en courbes pleines et épurées.
La jeune périgourdine, formée à l’école des
Beaux-arts de Bordeaux, rejoint en mai 1918, la sculptrice américaine Anna Coleman Ladd au sein d’une initiative invraisemblable. Celle-ci vient d’ouvrir le « Studio for Portrait Mask » sous l’égide de la Croix-Rouge américaine, un atelier qui fabrique des masques pour les « Gueules cassées ». Elle prend le parti de mettre son art au service de tous ces mutilés.
L'objectif consistait à recréer, à mi-chemin entre le moulage médical et la composition artistique, le visage des blessés par des masques occultant la zone mutilée. Ces postiches, réalisés premièrement en plâtre, étaient galvanisés de cuivre puis recouverts d’une peinture émaillée devant simuler la carnation du soldat. Une tâche bien ardue puisque chaque masque demandait environ un mois de travail.
En 1919, le romancier et critique d'art français André Salmon avait écrit: "Durant la guerre, Mlle Poupelet a sacrifié son avenir à l'humanité. Pour les mutilés de la face,
elle a obscurément donné son talent, créant des modèles, se fatiguant à faire des moulages pour re-sculpter des visages humains aux misérables héros défigurés par la mitraille imbécile."
Sources: Blog "Je beurre ma tartine" - Rue89 Bordeaux